Le 4 décembre marquait la fin du Charabia Festival 2021. La veille, le concert de clôture, assuré par Thomas Dutronc, se jouait à la Comédie. Aux premières lueurs des poursuites, une voix féminine dans l’assistance laisse échapper : « Haan, c’est le même ! ». Oui, on s’y tromperait ! Tout de noir vêtu, lunettes solaires aux contours rouges, ses mèches brunes indisciplinées, indéniablement sa silhouette évoque celle de son paternel. L’allure de son père, les yeux bleus de sa mère, le fils du couple des années Yé-yé ne peut renier ses origines. Au-delà d’un héritage physique certain, le chanteur sait s’entourer. A ses côtés, sur la scène de La Comédie, ce n’est pas moins de huit musiciens qui l’accompagnent. Le chanteur rompt la noirceur silencieuse de la salle de spectacle avec « C’est si bon », puis « Plus je t’embrasse (plus j’aime t’embrasser) », une adaptation française de la chanson « Heart of My Heart » de 1954, en charmeur qu’il est.
Pour son dernier album, Frenchy, celui-ci a convié plusieurs artistes pour dynamiser la chanson française et l’ouvrir vers l’extérieur en formant des duos « pour voyager, faire découvrir au reste du monde le côté frenchy ». Parmi les pépites de cet opus, Dutronc chante les paroles d’Henri Salvador avec « Petite Fleur » avant de reprendre la bande originale du film Virgin Suicides, composée par Air. Il rechausse ses influences swing-jazz-manouche en interprétant « J’suis pas d’ici » issu de son premier disque sorti en 2007.
Le chanteur vulgarise l’héritage français, en toute franchise. Il prône le partage de la gastronomie et des saveurs de l’Hexagone. Si bien que chaque soir, son équipe s’adonne à une dégustation de vin en live. Et celui-ci n’a pas fait exception ! Éric, pianiste de ses premières fonctions, s’est improvisé sommelier au comptoir d’un bar éphémère dressé au centre de la scène. Un bruit de bouchon et L’Indigène des Terrasses du Larzac se répand dans les verres ballon posés devant chacun. L’instant terroir amène des musiques « Django », pour lesquelles Aurore les rejoint au violon.
A la demande de son label, d’autres titres sont venus enrichir l’album Frenchy comme « Il y avait des arbres ». De Charles Trenet, Yves Montand à Serge Gainsbourg, introduit avec délicatesse par Thomas à la contrebasse, le compositeur-interprète a puisé son inspiration des grandes plumes qui ont fait naître les plus beaux textes de la chanson française.
Néanmoins, il revient toujours à ses premières amours, « Comme un manouche sans guitare ». Un solo de piano lui donne « Le sésame » de Silence on tourne, on tourne en rond avant qu’il ne renonce à la Capitale sous les traits du titre qui l’a rendu célèbre « J’aime plus Paris ». Pour cet ultime concert, il y avait du beau monde au balcon en la personne de Mathias Malzieu (presque incognito, mais moi je l’ai vu !) et Barcella, maître de cérémonie à l’initiative du Charabia Festival.
Les rappels ont pris vie sur les textes d’Aragon puisque « tout est affaire de décor » et de Salvador pour « Mademoiselle ». Ses ultimes paroles ont été en faveur des « frites fraiches », pour « un retour aux vraies valeurs ». Mais Dutronc n’en serait pas un s’il était trop lisse alors comme il l’a parfaitement souligné « faisons pétiller nos vies » !
Texte : Cindy Latique
Photos : Joel Dera
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